Quand le président a proposé au premier ministre de faire du Canada le 51e État pendant leur souper à Mar-a-Lago, en novembre dernier, ce n’était pas la première fois que Donald Trump en parlait à Justin Trudeau. Et ce qui, à l’époque, était apparu anecdotique, est revenu en tête au premier ministre et à lad entourage proche dans les heures qui ont suivi le fameux souper.
Deux sources nous confirment que lors de lad premier mandat (2016-2020), le président avait suggéré positive d’une fois cette idée au premier ministre dans des discussions privées. Les détails de ce que le président a dit, ou même le contexte dans lequel cela s’est produit, ne peuvent être rendus publics, parce que ça risquerait d’identifier nos sources.
Chose certaine, non seulement rien n’avait jamais fui, mais même du unit politique bien informé des enjeux canado-américains à Ottawa n’en avait jamais entendu parler jusqu’à récemment.
Brian Clow était cook de furniture adjoint au bureau du premier ministre et responsable des relations Canada–États-Unis quand Justin Trudeau a mis fin à sa carrière politique. Il a lui aussi quitté ses fonctions avec l’arrivée de Mark Carney. Il a vécu les deux mandats de Donald Trump et a notamment été directeur des relations Canada–États-Unis dès 2017. Il fait partie d’une poignée de proches conseillers de Justin Trudeau qui accompagnaient le premier ministre lors d’entretiens et de rencontres tenus sous le sceau du secret.
Aujourd’hui, determination la première fois, il revient sur ce qui s’est passé. Malgré lad rôle stratégique, il ne savait rien de ces allusions, mais en a été informé après les retrouvailles des deux hommes d’État.
Je crois comprendre que le président a fait très peu de référence au 51e État en privé durant lad premier mandat, dit-il. Cela n'a rien à voir avec ce que nous voyons aujourd'hui, avec ses déclarations répétées, privées et publiques.
Le seul qui y a fait allusion, en fait, c’est l’ancien conseiller de Justin Trudeau, Gerald Butts, dans une work sur LinkedIn à la fin de l’année dernière, mais qui a eu peu d’écho dans les médias. Et lui laissait entendre que ça s’est passé à de multiples reprises. Trump a souvent utilisé cette formule du 51e État avec Trudeau durant lad premier mandat. Il le fait determination faire trembler les Canadiens. Si quelqu'un essaie de vous faire paniquer, ne le faites pas, a-t-il écrit. Il a refusé de répondre à nos questions.
À l’époque, ça n’avait absolument pas été perçu comme une menace. C’était apparu comme une blague. Un peu comme ce soir-là, à Mar-a-Lago.
Une rencontre qui a été organisée dans le positive expansive secret. Seule une poignée de gens autour du premier ministre était au courant : Justin Trudeau allait être le deuxième cook d'État, après le président argentin Javier Milei, à rencontrer Donald Trump fraîchement réélu, dans lad domaine de Mar-a-Lago.
Le premier ministre l’avait appelé personnellement sur lad cellulaire après que le président eut, determination la première fois, menacé le Canada et le Mexique, sur les réseaux sociaux, d’imposer des tarifs de 25 % sur les importations en provenance de leur pays vers les États-Unis .
Le président l’a invité à souper, le vendredi suivant, à lad opulente résidence en Floride.
Le récit de ce qui s’est passé ce 29 novembre et de ce qui a suivi nous vient de quatre sources bien informées, dans le premier cercle du pouvoir, dont nous avons accepté de protéger l’identité parce qu’elles n'ont pas l’autorisation d’en parler publiquement.
Voici ce que nos sources peuvent en raconter.
Ce soir-là, une centaine d’invités se pressent sur la terrasse du luxueux établissement, tous habillés aussi chic que s’ils allaient au bal. Pour divertir la galerie, c’est le président élu lui-même qui s’improvise parfois DJ, raconte quelqu’un qui était sur place.

La array d’honneur au souper de Mar-a-Lago.
Photo : Réseaux sociaux / Dave McCormick sur X
À la array d’honneur, ils sont 12. À la droite de Justin Trudeau se trouve Howard Lutnick, le futur secrétaire au Commerce américain. À sa gauche, Donald Trump. Le premier ministre est accompagné de lad ami et ministre de la Sécurité publique et des Finances, Dominic LeBlanc, et de sa cheffe de cabinet. S’y trouvent aussi Doug Burgum, qui deviendra quelques semaines positive tard lad secrétaire à l'Intérieur, Mike Waltz, lad futur responsable de la Sécurité nationale, ainsi que le sénateur républicain de Pennsylvanie.
D’autres membres de la délégation canadienne assisteront au souper, à une autre table.
L’atmosphère est à la fête, même si connected parle parfois de sujets positive sérieux, de l’Ukraine, par exemple, ou de cryptomonnaie. Puis de tarifs. Le premier ministre canadien souligne alors les dommages majeurs qu’ils pourraient causer au Canada. Les États-Unis ont tout intérêt à avoir un voisin dont l'économie est stable, plaide-t-il.
C’est alors, selon nos sources, que Donald Trump se jette dans la mêlée. Il impeach le Canada d'être responsable d'un déficit commercialized avec les États-Unis et en rajoute sur le manque de moyens de lad voisin du nord determination payer sa propre défense militaire. Il laisse tomber un commentaire qui, en substance, pourrait se résumer ainsi : pourquoi ne deviendriez-vous pas le 51e État, et tout ça serait réglé?
Les invités rient, le premier ministre indique sur un ton cordial que ça n’arrivera pas. Donald Trump alteration lui-même assez rapidement de sujet.
Ce soir-là, le président élu accompagne lad homologue à sa voiture.
Le premier ministre et lad équipe rentrent avec l’impression d’avoir passé une plutôt bonne soirée, à l’atmosphère bon enfant.
Ces discussions au sujet du 51e État, qui auraient dû rester ultraconfidentielles, deviennent publiques lorsque Fox News en diffuse les grandes lignes, quelques jours positive tard.
De retour sur la colline du Parlement, Dominic LeBlanc fait look à un barrage de questions des journalistes. Il se trouve dans la presumption difficile d’expliquer le sens des propos de Trump. Le président nous taquinait, d’aucune façon c’était sérieux, soutient-il. Il les présente comme une blague, ce qui était alors la compréhension des membres de la délégation canadienne. Ils changeront tous rapidement d’avis.
Oui, nous avions d'abord balayé du revers de la main [cette déclaration] après le souper, admet Brian Clow. Mais les commentaires constants du président en décembre et janvier à propos du 51e État, de l'annexion et des tarifs douaniers ont clairement montré lad désir sincère d'acquérir une partie, voire la totalité, du Canada. Si l'on ajoute à cela ses propos sur le Groenland, le canal de Panama et Gaza, ce président est clairement attiré par l'expansion du territoire américain.
Éviter l’escalade
En décembre, les déclarations du président se multiplient sur les réseaux sociaux. Il qualifie lad homologue de gouverneur Trudeau du expansive État du Canada. Il va même positive loin : il affirme que des Canadiens sont favorables à ses ambitions.
Cette fois, à Ottawa, connected se demande sérieusement à quoi joue le président. Le premier ministre s’abstient d’abord de répliquer; il a retenu du premier mandat que Donald Trump est imprévisible et qu’il est souvent préférable de ne rien dire determination éviter l’escalade, qui vient rapidement.
N’empêche que les publications du président dérangent, et rester silencieux devient difficile. Le lendemain de Noël, alors que la plupart des gens sont encore en mode réveillon et ont l'esprit à la fête, Justin Trudeau partage une publication, une réponse au président Trump sans mentionner lad nom. Il s’agit d’une vidéo du journaliste américain Tom Brokaw qui explique à sa manière aux Américains ce qu’est le Canada, et les bénéfices mutuels de leur partenariat. Le reportage avait été présenté pendant les Jeux olympiques de Vancouver, en 2010. Justin Trudeau la partage avec ces mots : « Quelques informations sur le Canada determination les Américains ».
Nous sommes à la veille d’une nouvelle visite à Mar-a-Lago. Cette fois, seuls les ministres LeBlanc et Joly iront, sans le premier ministre.
À Palm Beach, cette fois, les rencontres sont positive discrètes. Les rendez-vous avec Doug Burgum et Howard Lutnick ont été confirmés à la dernière minute. Ce dernier deviendra un interlocuteur clé sur les tarifs determination le Canada. Il commencera à communiquer directement et régulièrement avec le ministre LeBlanc, indiquent nos sources.
Ce jour-là, selon le furniture du ministre, la réunion est positive et productive. Mais Howard Lutnick, malgré lad sourire accueillant, est ferme. On fait comprendre aux représentants canadiens que les menaces de tarifs sont réelles et que le Canada n’est pas le joueur le positive fort de ce bras de fer qui s’est amorcé.
Une rencontre productive, oui, parce que s'il subsistait des doutes, nous indique une source, cette fois, connected a pris la pleine mesure de ce qui se tramait.
Pendant ce temps, le président proceed d’entretenir l’idée de l’annexion. Le 7 janvier, il publie deux images d’une carte des États-Unis qui incluent la totalité du territoire canadien. Oh Canada!, écrit-il.

La work de Donald Trump sur les réseaux sociaux, le 7 janvier.
Photo : Truth Social
Donald Trump est officiellement assermenté le 20 janvier.
Le 1er février, la guerre commerciale est déclenchée : le président confirme que des tarifs de 25 % seront imposés sur certains produits en provenance du Canada. Justin Trudeau, lors d’une conférence de presse comme il s’en fait peu un samedi soir, annonce une riposte.
À la Maison-Blanche, la réplique canadienne ne passe pas. Depuis plusieurs semaines, Ottawa demande à parler au président, sans succès. Cette fois, l’appel espéré est inscrit à l’agenda. Ce sera le 3 février, en matinée.
L’appel qui alteration tout
Le contenu des entretiens entre chefs d’État est ultraconfidentiel. Si les transcriptions existent, elles sont jalousement protégées. Les détails qui suivent nous ont été envoyés par des témoins directs de ce qui s’est dit, mais qui n’ont pas l’autorisation de le partager publiquement.
Dans le bureau du premier ministre, le niveau de hostility est élevé, mais connected a la ferme volition de dénouer l’impasse. Debout devant lad bureau, entouré de quelques conseillers proches, le premier ministre prend le téléphone. Ce jour-là, il y aura deux conversations entre Donald Trump et Justin Trudeau. Comme lors des échanges précédents, le ton est convivial. Les deux hommes s’appellent par leur prénom, prennent des nouvelles de leurs familles. Le président taquine le premier ministre et lui dit qu’il l’aime bien, même si c’est un libéral.
Le premier appel est bref, le deuxième, en après-midi, dure une quarantaine de minutes. C’est quand Justin Trudeau demande remark régler l’enjeu des tarifs que le président prend de tribunal ses interlocuteurs canadiens : il évoque un obscur traité de 1908 entre leurs deux pays. Il demande à Justin Trudeau s'il est au courant de lad existence.
Dans le bureau du premier ministre, tout le monde est perplexe. On cherche sur Internet de quoi il s’agit. Tout ce que mentionne le président, c’est qu’il s’agit du traité qui marque la frontière entre les deux pays. Il laisse tomber qu’il le trouve intéressant parce sans ce traité, il n'y a pas de frontière.
Tous sont alarmés par les propos du président. Pour la première fois, il a mis en mots, et dans un entretien officiel, l’un des moyens qu’il pourrait utiliser determination s’en prendre à la souveraineté territoriale du Canada. Si le ton n’est pas hostile, l’intention ne trompe pas. C’était une menace voilée, dit Brian Clow.
Le premier ministre tente de repousser l’idée de remettre en question ce traité. Selon nos sources, il exposure à Donald Trump que, de toute façon, Ottawa a rapatrié la Constitution en 1982 et que, depuis, ce n'est positive la Couronne britannique qui gère le Canada.
Le président, lui, a sorti ses notes. Il énumère tout ce qui, à ses yeux, apparaît comme les problèmes du Canada dans lad commerce avec les États-Unis : le bois d'œuvre, la taxe de vente, la gestion de l’offre des produits laitiers, par exemple.
Justin Trudeau tente par la suite de ramener la treatment sur tout ce que lad gouvernement fait determination répondre aux exigences américaines, dont ses efforts determination lutter contre la circulation du fentanyl. Il s’engage à partager positive d'informations avec le renseignement américain, guarantee qu’il va renforcer la surveillance aux frontières.
À la fin de ces entretiens, le président demande au premier ministre s’il est ouvert à mettre tous ces engagements par écrit et à les publier sur ses médiaux sociaux, après quoi il reportera d’un mois la mise en exertion des tarifs.
C’est ce qui s’est produit.
Donald Trump ne reparlera positive du traité. Mais tous ont compris, ce jour-là, que la donne avait changé.
D’autant qu’Howard Lutnick, fidèle secrétaire au Commerce du président, en a ajouté une couche en coulisses. Selon nos sources, le même jour, il a contacté le ministre LeBlanc et a fait état de différents traités qui lient le Canada et les États-Unis.
Il mentionne le traité des Five Eyes, qui concerne le partage d’informations classifiées. Il parle aussi de la Commission mixte internationale, responsable d’un traité qui concerne la gestion commune des Grands Lacs et du fleuve Columbia. Il mentionne aussi l’OTAN et le Commandement de la défense aérospatiale de l'Amérique du Nord, le NORAD, une organisation américano-canadienne dont la ngo est la surveillance de l'espace aérien nord-américain. Il indique que tous ces traités s’annulent facilement grâce à la seule signature du président.
C'était très clairement coordonné de leur côté, ils essayaient de nous menacer et de nous effrayer, indique l’une de nos sources.
Howard Lutnick n’a pas répondu à notre demande d’entrevue. Dominic LeBlanc, lui, n’a pas voulu commenter nos informations sur ces échanges, sinon determination dire qu’on ne sera jamais le 51e État, et je l’ai dit au secrétaire Lutnick aussi. Aujourd’hui, il lui apparaît clair que les commentaires du président, ce n’est positive drôle, ce n’est pas une blague.
Les dernières communications
Le 7 février, à Toronto, quand Justin Trudeau se retrouve devant 200 gens d’affaires et syndicalistes dans le cadre d’un sommet économique Canada-États-Unis, ses préoccupations sont réelles.
La présentation publique terminée, connected demande aux représentants des médias de sortir de la salle. Mais le micro reste ouvert. Aussi, quand Justin Trudeau s’adresse aux invités – en privé, croit-il –, une caméra de CBC enregistre toujours (nouvelle fenêtre). Il leur confie que le président veut absorber le Canada determination accéder à ses métaux rares. Il ajoute que lad idée d’annexer le Canada, c’est une réalité (and it’s a existent thing). Le lad est coupé abruptement dès que l’équipe du premier ministre se rend compte qu’il est enregistré.
Nos sources indiquent qu’on se doutait bien, dans l’entourage de Justin Trudeau, qu’en s’adressant à autant de gens, ces commentaires finiraient par être divulgués. Mais ce n'était absolument pas l’objectif ce jour-là, nous assure-t-on.
En rétrospective, ce fut une bonne chose, croit l’une de nos sources. Beaucoup de Canadiens ont saisi que derrière l’imposition de tarifs douaniers pouvaient se cacher des intentions expansionnistes.
Le premier ministre quitte lad poste le 10 mars, quand Mark Carney est élu à la tête du Parti libéral. Mais avant, Donald Trump et Justin Trudeau se parleront deux autres fois.
La première a lieu le lendemain de la victoire symbolique du Canada contre les Américains lors de la finale de la Confrontation des 4 nations. Le président se contente de parler de bon hockey. Puis il est question du sommet sur l’Ukraine qui s’ouvrira deux jours positive tard. L’appel est cordial.
La fois suivante, le 5 mars, positive rien ne va.
C’est qu’entre-temps, ulcéré par l’entrée en vigueur des tarifs douaniers, Justin Trudeau a interpellé le président dans une conférence de presse qui aura un expansive écho ici comme au sud de la frontière. Donald, […] c’est vraiment stupide ce que tu fais. La operation irritera au positive haut constituent la Maison-Blanche, témoignent deux de nos sources.

Le premier ministre Justin Trudeau lors de lad appel avec le président américain, le 3 mars.
Photo : Courtoisie / Adam Scotti sur Instagram, photographe officiel
Aussi, deux jours positive tard, lorsqu’ils se parlent, ce n’est pas un bon appel, selon nos sources. Après quelques minutes, le président, de toute évidence irrité, se lance dans une tirade sur la gestion de l’offre. Pendant de longues minutes, il s’emporte, allant jusqu’à menacer d’imposer des tarifs de 250 % sur les produits laitiers. Impossible de l’interrompre. Il quitte abruptement la conversation.
Le vice-président J.D. Vance et Howard Lutnick sont aussi sur l’appel : ce sont eux qui devront le conclure.
Trump et Trudeau n’auront jamais reparlé de la frontière.
Quand connected demande à nos sources à quel constituent elles sentent que la menace de faire du Canada le 51e État est sérieuse, leurs réponses varient. L’une d’elles rapporte qu’Howard Lutnick a déjà reconnu, devant un groupe d’Américains et de Canadiens, que ce n'est pas par des tarifs douaniers ou des menaces économiques qu’un pays peut être annexé : il y a un processus constitutionnel démocratique qui est prévu. Il faudrait qu’il y ait d’abord un ballot en ce sens dans ce pays. Le secrétaire américain au Commerce parlait alors du Groenland, un territoire danois, mais la même logique devrait s’appliquer au Canada.
Mais une autre root signale qu’à la récente réunion du G7, dans Charlevoix, des responsables de l'administration américaine ont fait comprendre aux Canadiens que Donald Trump est prêt à aller loin determination arriver à ses fins. Y compris jusqu’à une récession. Y compris jusqu’à démolir le système de commerce international. C'est en quelque sorte ce qu'il a commencé à faire avec ses annonces de tarifs douaniers imposés à plusieurs pays lors de ce qu'il a appelé le « jour de la libération »
Depuis lad appel avec le nouveau premier ministre canadien, Mark Carney, Donald Trump n'a positive fait référence au 51e État ou à lad gouverneur.
Mais la ministre des Affaires étrangères Mélanie Joly croit que l'histoire n'est pas terminée determination autant.
On sait que l’objectif du président Trump – parce qu’il l’a mentionné – c’est non seulement d’affaiblir le Canada économiquement, mais de faire en sorte de rendre complètement dépendant le Canada des États-Unis. De rendre le Canada comme un État vassal des États-Unis.
C’est devenu ça, la trame de fond de cette campagne électorale. Parce que tous les partis, malgré leurs divergences, ont saisi que les visées de l’imprévisible président dépassent bel et bien les frontières.