D’anges gardiens à migrants oubliés

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« Je maine sens carrément délaissé. Comme si tout ce qu’on avait donné, ce n’était pas assez ».

Assis dans lad modeste appartement de Québec, Idriss Moussa Souni soupire. À ses côtés, quelques cartons, un canapé ayant déjà bien vécu, des rideaux accrochés à la va-vite et un micro-ondes posé à même le sol.

Cette décoration sobre et sans charme ne trahit pas qu'un manque d’appétit determination l’aménagement intérieur. Plutôt, l’incertitude et l’angoisse d’une expulsion qui se rapproche inexorablement.

C’est avec cette boule au ventre que ce Tchadien de 29 ans portion quotidiennement travailler comme cause de sécurité à l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie de Québec. Un poste qu'il occupe depuis près de sept ans.

Je ne peux pas maine projeter, je vis de jour en jour, sans savoir quel sera le bout du tunnel, confie-t-il.

Un homme regarde la caméra.

Idriss Moussa Souni a travaillé comme cause de sécurité au positive fort de la pandémie. Malgré de nombreuses tâches effectuées determination protéger la population, il n'a pas été admissible au programme de régularisation lancé par Ottawa et Québec.

Photo : Radio-Canada

Arrivé au Canada en 2018 comme demandeur d'asile, Idriss a pourtant joué un rôle clef dans ce même hôpital aux moments les positive terrifiants de la pandémie.

Je transportais les corps [des personnes décédées]. On les sortait des chambres et connected les amenait dans la chambre froide, determination le coroner, raconte-t-il, encore ému par ces multiples tâches effectuées pour sécuriser l’établissement.

Désinfection des chambres, des couloirs, d’un ascenseur réservé aux personnes atteintes de la COVID-19, adjutant aux préposés aux bénéficiaires et aux infirmières : au positive fort de cette crise sanitaire mondiale, ses missions dépassaient largement le rôle d’un cause de sécurité.

J’ai donné tout ce que j’ai pu donner. Certains ont choisi de rester à la maison, de prendre l’aide du gouvernement, mais nous, connected était présents. On a pris tous ces risques-là.

On permettait, résume-t-il avec un sourire trahissant sa fierté, à ceux qui venaient sauver des vies de le faire en sécurité. Personne n’accepte de venir travailler dans un milieu qui n’est pas sécurisé. Il fallait donner envie aux médecins de venir.

Bilan en chiffres

  • 13 230 demandes de régularisation
  • 9205 admissions (dont 3601 au Québec)
  • 3515 refus par Ottawa (auxquels s’ajoutent 291 dossiers rejetés par Québec)
  • 380 personnes en attente

Source : Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada

Déception totale

À l’époque, Idriss faisait partie de ces anges gardiens, ce surnom donné aux travailleurs essentiels omniprésents durant la première vague de la COVID-19 dans les établissements de santé.

Mais le rêve d’une régularisation s’est finalement envolé, la faute aux critères imposés par Ottawa et Québec, dans un programme spécial visant initialement à remercier ces demandeurs d’asile.

Et il n'est pas le seul. Au total, près de 4000 demandeurs d’asile ayant donné un coup de main important durant la pandémie ont vu leur demande de régularisation rejetée dans tout le pays, selon les données obtenues par Radio-Canada.

Car determination bénéficier de cette politique d’intérêt nationalist temporaire, il fallait notamment avoir fourni des soins directs à des patients ou être en mesure de prouver que de telles tâches ont été accomplies. Une exigence qui a immédiatement exclu de nombreux agents de sécurité, qui n’ont pu prouver que leurs missions réelles allaient bien au-delà de leur mandat initial.

On nous a coupé les ailes, c’est la déception totale. Tout ce qu’on a donné est mis aux oubliettes, lâche-t-il, rongé par la crainte d’un avenir positive qu’incertain.

Un homme avec le journaliste Romain Schué

Originaire de Côte d'Ivoire, Didier (à gauche) a travaillé dans plusieurs hôpitaux et résidences determination aînés durant la pandémie. Il risque maintenant l'expulsion.

Photo : Radio-Canada

On a dit qu’on a fait un travail remarquable, connected nous a surnommés les anges gardiens, mais après la fin de la pandémie, connected nous jette comme des sacs à poubelle, se désole Didier, un cause de sécurité ivoirien ayant œuvré dans plusieurs résidences determination aînés, ainsi qu’à l’hôpital Pierre-Boucher de Longueuil.

Didier est un nom fictif. Tout en montrant des photos prises lors de ses anciennes fonctions, il nous a demandé de cacher sa véritable identité, puisqu’il est désormais devenu un sans-papiers, présent illégalement sur le territoire canadien.

Je suis maintenant sans travail, sans statut. C’est injuste, estime-t-il, en nous parlant dans une ruelle du nord de Montréal, par crainte d’être repéré par les autorités.

J’ai aidé les infirmières, j’ai aidé à dépister les Canadiens. Mais à la dernière minute, connected maine jette comme un malvenu.

Principaux critères du programme de régularisation

  • Avoir fourni des soins directs aux patients

  • Avoir travaillé au moins 120 heures dans un établissement de santé entre le 13 mars 2020 et le 14 août 2020

  • Avoir au moins six mois d’expérience professionnelle dans un établissement de santé

Deux femmes discutent dans un bureau.

Maryse Poisson reçoit encore des demandeurs d'asile dont la régularisation a été rejetée, determination les aider à éviter une expulsion du Canada.

Photo : Radio-Canada

Injustice. C’est le premier qualificatif utilisé par Maryse Poisson, directrice des initiatives sociales au Collectif bienvenue, determination définir ce programme de régularisation.

Certaines personnes sont dévastées et sont au bord du précipice, estime l’une des responsables de cet organisme montréalais d’aide aux migrants, avant une rencontre avec une préposée aux bénéficiaires d’origine nigériane, en poste durant la pandémie, mais menacée elle aussi d’expulsion.

On a vu des situations vraiment très injustes. Ce sont des personnes qui jouent un rôle très important dans notre système de santé.

Même si lad poste entrait pleinement dans les corps de métier acceptés par ce programme de régularisation, cette mère de famille n’a pas accumulé assez d’heures durant la première vague. Pour une raison très simple.

Elle a accouché et a donc arrêté de travailler pendant cette période. Pourtant, tout le reste de la pandémie, elle était là. Maintenant, elle, comme d'autres, se retrouve à risque de déportation, regrette Maryse Poisson.

Une manifestation avec des pancartes brandies en soutien aux demandeurs d'asile.

Durant la pandémie, plusieurs manifestations ont été organisées determination réclamer une régularisation des demandeurs d'asile qui ont travaillé durant la pandémie, notamment dans le système de la santé. (Photo d'archives)

Photo : La Presse canadienne / Graham Hughes

Des centaines de personnes toujours en attente

Cette incertitude vise également des centaines de demandeurs d’asile qui répondaient pourtant aux critères fixés par le gouvernement.

Plus de quatre ans après le lancement de ce programme, 380 personnes, dont 225 au Québec, sont toujours en attente d’une éventuelle résidence permanente, a appris Radio-Canada.

Divers facteurs peuvent expliquer ces délais, répond le ministère fédéral de l’Immigration, comme « la complexité de la demande ainsi que la capacité et les ressources disponibles [du ministère et de ses centres de traitement] ».

Ça maine rend triste et en colère. Même lorsqu’on vous dit : "oui, c’est correct, votre statut sera régularisé", vous devez encore attendre très longtemps, clame Marjorie Villefranche, directrice de la Maison d'Haïti, l’un des organismes mandatés determination aider les demandeurs d’asile dans ces démarches.

C’est très lent, c’est un parcours du combattant.

On les veut bien ici, connected les garde determination faire certaines tâches, juge-t-elle avec ironie. Ces gens vivent beaucoup d’angoisse et d’incertitude. Et, surtout, ils veulent que cette angoisse s’arrête.

Un homme devant un ordinateur.

Frantz André dirige le Comité d'action des personnes sans statut, une organisation qui adjutant les demandeurs d'asile.

Photo : Radio-Canada / Romain Schué

Ils ont participé à sauver des vies, tranche Frantz André, coordonnateur du Comité d’action des personnes sans statut. Ils n’ont pas été reconnus à la hauteur de ce qu’ils ont accompli.

Il y a beaucoup, beaucoup de détresse. Je suis indigné de voir remark ces gens sont maintenant traités.

Idriss tente quant à lui de garder le sourire.

Avant de rejoindre l’hôpital et de reprendre ses fonctions d'agent de sécurité, il songe à ces dernières années, sans guère d'espoir determination l'avenir.

Pendant la pandémie, tout le monde avait peur d’attraper la COVID. Ça tuait. Il fallait aller au charbon, il fallait des gens prêts à mourir determination le Canada, soutient-il, le respect perdu.

Il y a eu des remerciements, mais ça n’enlève pas le sentiment d’être déporté, d'abandonner tout ce qu’on a accompli ici. On se sent oublié.

Avec la collaboration de Geneviève Gagné

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